Tamiya North American RF-51D Mustang 1/48ème

L'homme et l'avion

Quiconque a fréquenté le milieu de l'aviation ancienne en Californie du Sud pendant les cinquante dernières années a au moins entendu parler du Rév. B.C Reed, s'il ne l'a pas rencontré lors d'un meeting. Je l'ai rencontré pour la première fois au Merced Antique Fly-in en 1978. Il s'appuyait sur la réplique du Gee Bee " Z " Super Sporster de Bill Turner, et était en train de lui dire " Tu sais, tu vas finir par te tuer avec cet engin " (il avait presque raison : Bill fit un cheval de bois plus tard dans la journée en se posant sur le terrain de Half Moon Bay, terminant sur le dos dans un fossé. Bill ne pilota plus la machine et celle-ci est suspendue au plafond du Santa Monica Museum Of Flying).

J'ai revu B.C de ci de là, lors de meetings d'avions anciens ainsi qu'au Plane of Fame Museum ; dans tout ce qu'il a fait pour ce musée, il y a la livraison de " Spam Can " en Mars 1957. C'était le premier avion du musée en état de vol, et c'est maintenant le plus ancien Mustang propriété privée au monde.

Un fou d'avion étant un fou d'avion, le jeune B.C. commença par prendre des photos d'avions aux National Air Races de 1927 à Mines Field. Il fit des photos de Charles Lindbergh quand le célèbre pilote visita la Californie du Sud. En 1940, B.C réalisa le rêve de sa vie, quand il fut accepté par l'US Army Air Corps comme cadet de l'aviation. L'air Force, dans son infinie sagacité, estima que le talent du Cadet Reed avec un appareil photo méritait d'être récompensé, et B.C. se retrouva affecté au 107ème Tactical Reconnaissance Squadron du 67ème Tactical Reconnaissance Group, volant sur F-6A (la variante reco du P-51A) au sein de la 9ème Air Force en France, sur les Pays Bas et en Allemagne après le débarquement en Normandie. Reed dit d'ailleurs quele Mustang à moteur Allison était le plus amusant à piloter de tous les Poneys de North American. B.C. resta à côté de son bien aimé Mustang après la guerre en tant que membre de la Réserve, et, le 3 Septembre 1950, le Commandant B.C. Reed se trouva affecté au 45ème Tactical Recce Squadron, qui faisait lui aussi partie du 67ème Tactical Reconnaissance Wing. Ils étaient à Itazuke, au Japon, sous les ordre de son ancien commandant, le légendaire Lieutenant Colonel Karl Polifka, l'homme qui avait inventé la reconnaissance tactique pour l'USAAF. La version du Mustang qu'il pilotait était le RF-51D, l'une des variantes les moins connues du 'Stang et l'une des plus importantes.

Le boulot de la reco tactique est dangereux : on est au ras des pâquerettes, en train de chercher des gens et des machines qui ne veulent pas qu'on les trouve et on essaie d'en ramener des photos avant que les gens en question ne vous abattent. Le boulot du 45ème TRS était de couvrir les lignes de front, en faisant de la reco visuelle et photographique. Pendant l'avance, puis la retraite des forces des Nations Unies cet automne et cet hiver là, l'unité effectua aussi bon nombre de pénétrations profondes de reconnaissance armée bien au Nord de la zone des combats, à l'intérieur de ce qui allait être connu comme "Mig Alley ". Les pilotes du 45ème TRSétaient les premiers pilotes de Mustang à être pourchassés par les MiG 15. Seule l'expérience de ces pilotes, acquise au combat durant la Deuxième Guerre Mondiale, leur permit d'éviter des pertes au cours de ces rencontres.

Quand les lignes de front se stabilisèrent autour du 38ème parallèle en 1951, la tactique changea. Opérant depuis K-2 à Taegu, deux RF-51D couvraient une zone géographique donnée, l'un volant en couverture haute à 3000 pieds et surveillant les tirs venus du sol, pendant que l'autre descendait à 300 pieds du sol et cherchait les emmerdes. Sachant qu'un Mustang est cuit dès qu'un plomb de carabine à air comprimé se loge dans son radiateur, le niveau des pertes était élevé. Ce printemps, l'unité mit au point une nouvelle tactique, le " Cercle 10 ". Le principe était de voler sur un cercle de 10 miles de rayon autour d'une zone où une activité de véhicules ennemis avait été signalée la nuit précédente. Chaque pilote avait la responsabilité d'une zone qu'il connaissait comme sa poche ; bien que toute activité routière ennemie s'arrêtât à l'aube, les pilotes recherchaient ce qui n'était pas à sa place, ce qui n'était pas là la veille. Quand ils trouvaient ce qu'ils cherchaient, ils appelaient les chasseurs-bombardiers qui infligeaient des pertes terribles à l'ennemi. Les Chinois haïssaient ces voyeurs, et aucun pilote de reco abattu et pas immédiatement secouru par les forces des Nations Unies n'arriva jamais dans un camp de prisonnier. Lors de l'été 1951, les T-6 " Mosquitos " subissaient des pertes terribles, et étaient limités à des missions au plus à deux miles au Nord de la ligne de front. Le 45ème TRS reprit le flambeau. Le 1er Juillet, le Lt Colonel Polifka fut tué alors qu'il essayait de s'extirper d'un Mustang endommagé. Son parachute s'emmêla dans la dérive, et il fut entraîné par le Mustang.

En Août 1951, le 45ème transféra ses quartiers à K-14, Kimpo Air Base, où il continua à souffrir terriblement des tirs venus du sol. En Janvier 1952, l'altitude minimale passa de 4000 à 6000 pieds, et les pilotes de reco commencèrent à voler avec une escorte destinée à calmer les ardeurs de l'artillerie anti-aérienne. Quand l'unité commença à échanger ses RF-51D contre des RF-80A à l'automne 1952, il ne restait plus de RF-51D dans l'Air Force autre part qu'en Corée, et le 45ème avait subi un taux de pertes de 200% en deux ans de combat (Note pour les matheux amateurs et parfois ramollis de la comprenette : ça veut dire que les effectifs avaient été renouvelés ENTIEREMENT deux fois, pas qu'ils avaient perdu deux fois plus de pilotes qu'ils n'en avaient).

Après la guerre (durant laquelle il avait survécu à deux tours d'opérations au 45ème TRS) BC quitta l'Air Force pour embrasser un ministère religieux, devenant le Révérend B.C. Reed, juste avant de piloter le Mustang qui allait devenir " Spam Can " depuis Maxwell AFP, Alabama, jusqu'à l'aéroport d'Ontario, où se trouvait alors le Musée Aérien " Planes Of Fame ".

Presque toutes les photographies de RF-51D prises durant la guerre de Corée sont l'œuvre du gamin qui avait photographié Charles Lindbergh. B.C. ne s'est jamais lassé de prendre des photos d'avions, et si vous vérifiez dans votre bibliothèque les crédits photo, vous trouverez au moins une ligne " Photo : B.C. Reed ". C'est le genre d'homme qui prouve que " Les pilotes sont des gens bien ", et merde à tout ce qui pourrait démontrer le contraire.

La maquette

En tant qu'allumé grave du Mustang, avec 20 maquettes dans ma collection et 40 autres que j'ai faits et qui sont exposés au Plane Of Fame Museum, ça faisait longtemps que j'avais envie de faire un Mustang Reco. Aeromaster a sorti une planche consacrée aux F-51 de la guerre de Corée qui comprenait un avion du 45ème TRS. En fait, l'avion fait un peu dingue, avec des pois blancs sur une casserole d'hélice, une dérive, les bouts d'ailes et la profondeur bleu moyen. J'ai demandé à B.C. pourquoi ces couleurs étonnantes, et il m'a répondu " Tu crois vraiment que des gens assez cinglés pour faire ce genre de missions vont avoir un avion " convenable " ?

B.C. Reed n'a jamais eu d'avion attitré, mais son carnet de vol montre qu'il a effectivement fait quatorze missions aux commandes du RF-51D 44-11913 " Tullie, Scottie & … ". Le nom venait du pilote original de l'avion, un homme dont la femme était enceinte au moment de son départ pour la Corée. Il disparut aux commandes d'un autre appareil avant la naissance de son enfant, et aucun pilote de l'escadron n'eut le cœur de débaptiser l'avion.

Quand j'ai reçu de France un P-51D Tamiya avec les pièces en résine pour faire un F-6D/RF-51D, les dés étaient jetés. Et malgré les très jolis décals Carpena, pour trois F-6D de l'Armée de l'Air, je savais que cette maquette devrait représenter un oiseau du 45ème TRS.

Construction

Que dire ? C'est du Tamiya. On suit les instructions et on a une belle maquette. Vous rajoutez le magnifique cockpit en résine True Details ainsi que la verrière thermoformée Squadron, et c'est encore mieux, quelle que soit la version choisie !

Conversion

Manque de bol, la première chose dont je me suis aperçu lors d'essais à blanc des pièces en résine (les caméras à bâbord), c'est qu'à part la grande plaque bombée à l'extrémité de la cocarde, elles sont toutes surdimensionnées. Après quelque temps de réflexion, j'ai fini par utiliser des tubes Evergreen coupés suivant mes besoins et remplis de Micro Krystal Kleer pour faire les optiques. J'ai aussi utilisé une antenne gonio d'un Mustang Hasegawa. N'oubliez pas que les Mustang de l'USAF en Corée avaient le cockpit peint en noir (Ce cas de Corée me turlupine, j'ai pas pu résister), et que la plupart d'entre eux avaient les pales sans manchons Hamilton Standard qu'on trouve dans la boîte Tamiya F-51D Korean Mustang. Il y avait des pales à manchon aussi, alors vérifiez vos références !

Peinture

A l'origine, les Mustangs étaient Métal Naturel, à part les ailes qui recevaient une laque Aluminium pour tenter de maintenir l'écoulement laminaire autour de ces dernières. A l'époque de la Corée, les Mustangs commençaient à vieillir, et la corrosion devenait problématique. La plupart de ceux qui firent cette guerre reçurent une couche de laque alu, ce qui explique pourquoi ils avaient l'air tellement fatigués sur les photos. Certains " experts " disent que si vous voyez un Mustang avec le panneau autour des échappements d'une teinte différente des panneaux environnants, vous avez un Mustang métal naturel. Faux ! A cause des gaz d'échappement qui brûlaient le métal, ces panneaux n'ont jamais été peints. Pour vérifier si le Mustang est métal naturel ou laqué, regardez aux alentours du radiateur, juste au dessous de la cocarde. Si les panneaux à cet endroit sont de couleur différentes, il y a des chances que le 'Stang soit métal naturel. Sinon, c'est de la laque alu. Peut-être. La peinture vieillissait atrocement mal ; ces machines travaillaient dûr dans un environnement particulièrement hostile.

Tous les RF-51D utilisés en Corée avaient reçu une couche de laque aluminium. La difficulté est de les patiner de manière appropriée. J'ai pré-ombré mon modèle avec du noir brillant Tamiya, puis j'ai passé de très fines couches d'aluminium SnJ, laissant les ombres de la sous-couche ternir la laque. Une couche de Klir pour mettre les décals, puis j'ai passé une couche de vernis mat, après avoir utilisé du Smoke de Tamiya pour simuler les fuites d'huile, les trainées d'échappements et tous les outrages qu'avait pu subir cette pauvre machine.

Decals

Une fois la maquette préparée, les décals Aeromaster n'ont posé aucun problème. J'ai utilisé une planche Superscale de bleu moyen USAF pour les marquages. La planche Aeromaster fournit plein de points blancs pour les pois. Ne vous inquiétez pas pour leur disposition, il n'y avait pas de schéma établi. Mettez simplement des points blancs partout sur le bleu.

Finitions

Après séchage des décals, j'ai passé une couche de Klir pour les protéger, puis j'ai passé un mélange dit " Klir mat ", soit 70% de Klir et 30% de base mattante Tamiya, appliquée en plusieurs couches jusqu'à ce que j'obtienne le genre de mat que je voulais.

La canopée a été trempée dans du Klir avant d'être découpée et peinte. Elle a ensuite été collée à la colle blanche.

Le train d'atterrissage a été collé ensuite. Je donne toujours aux roues un aspect vaguement boueux : je les empale sur un x-acto, puis les peins avec une couleur " marron boue " qui varie d'une maquette à l'autre. Le truc est de garder le mélange fin, de façon à voir les sculptures du pneu. Le résultat final donne des roues qui sont plus que de simples ronds noirs.

Conclusion

Ayant eu la chance de passer pas mal de temps autour de Mustang à l'échelle 1 au cours des trente dernières années, je peux dire que le Mustang Tamiya au 1/48ème est le meilleur : il a l'air vrai une fois fini, particulièrement avec les volets baissés. J'aime vraiment mon Mustang Mateur, et ce d'autant plus qu'il est peu courant.    

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